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ce n’est ni le temps, ni une connoissance approfondie de ses bonnes qualités, qui lui ont gagné votre estime. Votre imagination ne s’est pas donné la patience de le mettre à la moindre épreuve, et c’est dans les premiers momens de sa fougue, qu’elle vous l’a représenté avec tant de perfections, tant d’excellentes qualités, qui ne pouvoient être découvertes qu’à la longue et dans une liaison intime.

Vous vous êtes flattée, en croyant que votre prévention étoit fondée sur une estime du mérite en général, sur un principe d’équité : votre cœur s’étoit déjà rendu avant que vous soupçonnassiez qu’il fût en danger.

J’ai été cent fois sur le point de vous faire sentir les risques que vous couriez ; mais j’espérois toujours que cette même inexpérience, qui a donné lieu à votre méprise, y apporteroit aussi du remède à l’aide du temps et de l’absence : j’ai différé de dissiper votre illusion, parce que je m’attendois qu’elle contribueroit à vous tranquilliser, et parce qu’en vous laissant ignorer la force et le danger de votre attachement, je prévenois peut-être ce découragement, qui, aux yeux de la jeunesse, rend tout sacrifice im-