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au milieu des acclamations de ses compagnons.

Dès que nous les eûmes perdus de vue, sir Clément n’eut rien de plus pressé que de demander de mes nouvelles : « Quel hasard, me dit-il, ma très-chère vie, quelle étrange révolution vous amène dans ces lieux-ci » ?

Honteuse et humiliée de ma situation, je gardai le silence. Ses questions réitérées me mirent cependant dans la nécessité de répondre, et je lui dis en bégayant : « J’ai perdu, je ne sais comment, ma coterie ».

Il me pressa la main, en ajoutant d’un ton de voix passionné : « Oh ! que ne t’ai-je rencontrée plutôt » !

Choquée d’une licence à laquelle je m’attendois si peu, je m’arrachai de ses mains. « Est-ce là, monsieur, la protection que vous m’accordez » ?

Alors je remarquai ce que mon trouble m’avoit empêchée d’observer plutôt : il m’avoit fait passer dans une autre allée aussi sombre que la première. « Grand Dieu ! m’écriai-je, où suis-je ? quel chemin prenez-vous » ?

« Un chemin, où nous n’avons point de témoins à craindre ».