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vation de votre âme ; et si cet affreux sacrifice n’accablait que moi ; si je croyais que vous pussiez recouvrer votre première félicité… je m’efforcerais de le soutenir. Vous pouvez en être assûré, lui répondit-elle avec sa dignité ordinaire ; je ne dois pas espérer d’être exempte de toutes les calamités attachées à l’humanité ; mais je saurai les supporter patiemment, et sans m’en plaindre. Que le ciel vous comble de ses bénédictions, reprit-il. Et laissant sa main il s’empressa de sortir. Ô devoir ! que ton triomphe est glorieux ! s’écria madame Delvile en courant à Cécile et la serrant entre ses bras. Fille généreuse et incomparable ! je n’aurais jamais cru que tant de vertu fût compatible avec la faiblesse humaine.

L’héroïsme de Cécile, en perdant son objet, perdit aussi sa force ; elle soupira, ne put parler, ses yeux se remplirent de larmes ; et baisant la main de madame Delvile d’un air qui lui prouva qu’il était impossible de s’entretenir plus long-temps avec elle, elle se hâta de se retirer, quoiqu’elle eût à peine la force de se soutenir,