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pendant le reste de la soirée, et elle sortit bientôt, très-préoccupée, et desirant d’être seule pour se livrer aux nouvelles réflexions que la situation de son cœur faisait naître.

La première fois qu’elle avait vu le jeune Delvile, elle avait admiré, sans le vouloir, ses manières et sa façon de s’énoncer ; et toutes les fois qu’elle l’avait vu depuis, elle avait toujours remarqué en lui d’autres qualités qui le lui avaient rendu encore plus recommandable. Elle le voyait, le rencontrait avec plaisir, et ne s’en séparait jamais sans desirer de le revoir. Cependant, comme la passion chez elle était subordonnée à la raison, son affection ne triomphait point de ses principes. À peine vit-elle le danger, qu’elle en fut épouvantée, et résolut sur le champ de s’opposer aux progrès d’un goût trop décidé, que le temps ni l’intimité n’avaient point encore justifié. Elle eut un grand soin d’occuper tous ses moments, afin de laisser moins de carrière à son imagination ; et si elle s’était apperçue que son caractère fût différent de ce que son ex-