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Havisam croisa sa jambe gauche sur sa jambe droite, rapprocha le bout de ses doigts l’un de l’autre ; c’était sa pose favorite quand il avait à parler affaires : il se disait que le moment était venu de fournir quelques explications à l’enfant.

« Un comte, commença-t-il, est un personnage très important.

— Un président aussi, reprit Cédric. La marche aux flambeaux a cinq milles de long, on tire des fusées et on fait de la musique… M. Hobbes m’a emmené voir cela ; c’était très beau.

— Un comte, reprit l’homme de loi, est généralement de très ancien lignage.

— Qu’est-ce que cela veut dire ?

— De très vieille famille, extrêmement vieille.

— Je crois que je comprends, dit Cédric, enfonçant ses mains plus profondément encore dans ses poches. La marchande qui vend des pommes à l’entrée du parc doit être de très ancien… comment dites-vous ?… lignage. Elle est si vieille que c’est tout au plus si elle peut marcher. Elle a bien cent ans ; et cependant elle reste là quand il pleut. Cela me fait de la peine, et aux autres garçons aussi. Un dimanche on avait donné à Billy, mon camarade de classe, un dollar ; je le priai d’acheter tous les jours à la vieille femme pour deux ou trois sous de pommes, jusqu’à ce qu’il n’eût plus d’argent. Il ne demanda pas mieux, car c’est un très bon garçon ; seulement le jeudi il en avait assez. — Vous comprenez, manger tous les jours des pommes, c’est ennuyeux, si on ne les aime pas beaucoup. — Par bonheur, ce même jour, une dame qui vient quelquefois voir maman m’en donna un, de dollar, et