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DU GOUT.

en un moment les ténèbres de leurs esprits. Au lieu que ceux qui ont cultivé l’espèce de connaissance qui fait l’objet du goût, acquièrent par degrés et par habitude un jugement non-seulement aussi sain, mais aussi prompt qu’on se le forme sur toute autre matière par les mêmes méthodes. D’abord on est obligé d’épeler, mais enfin on parvient à lire facilement et avec célérité. Cependant cette célérité avec laquelle le goût opère, ne prouve pas qu’il soit une faculté distincte. Tout homme qui a suivi le cours d’une discussion sur des matières du ressort de la pure raison, doit avoir observé l’extrême rapidité avec laquelle tous les fils de la question sont suivis, les preuves découvertes, les objections élevées et combattues, et les conclusions tirées des premières propositions ; et là, où selon toute probabilité la raison agit seule, il doit avoir remarqué autant de vivacité qu’on peut en supposer aux opérations du goût. Il est parfaitement inutile, et très-peu philosophique, de multiplier les principes pour chaque apparence différente.

Cette matière est susceptible de plus grands développemens, je le sais ; mais ce n’est pas l’étendue du sujet qui doit nous prescrire des