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DU GOUT

sont dans l’ordre accoutumé ; par conséquent ils ne font aucune impression sur l’imagination : mais deux objets distincts qui ont une ressemblance, nous frappent, nous attachent, nous plaisent. L’esprit humain a naturellement plus d’ardeur et de satisfaction à observer des ressemblances qu’à chercher des différences ; parce qu’en établissant des ressemblances, nous produisons de nouvelles images ; nous unissons, nous créons, nous enrichissons le trésor de nos idées : au lieu qu’en faisant des distinctions, nous n’offrons aucune nourriture à l’imagination ; la tâche même est plus pénible et moins agréable, et le plaisir que nous y prenons est en quelque façon d’une nature indirecte et négative. Dès le matin on me rapporte une nouvelle ; cela, simplement comme une nouvelle, comme un fait ajouté à ma mémoire, me donne quelque plaisir. Vers le soir j’apprends qu’elle est fausse. Que gagné-je à cela, sinon le déplaisir de trouver que j’ai été trompé ? De là vient que les hommes sont naturellement plus portés à la crédulité qu’au sentiment contraire, Et c’est sur ce principe que les peuples les plus ignorans et les plus barbares ont souvent excellé dans les similitudes, les comparaisons, les métaphores