Page:Burke Edmund - Recherche philosophique sur l origine de nos idees du sublime et du beau - 1803.djvu/54

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
30
DU GOUT

de l’homme qui le possède ; et c’est de ces dispositions qu’on doit tirer toutes les conséquences.

Cet accord du genre humain ne se borne pas au goût. Le principe du plaisir qu’on reçoit par le sens de la vue est le même chez tous les hommes. La lumière plaît davantage que l’obscurité. L’été, lorsque la terre est revêtue de verdure, lorsque les cieux étincellent d’azur et de feu, l’été est plus agréable que l’hyver, où la nature s’offre sous un aspect tout différent. L’expérience a prouvé que si l’on montre à plusieurs spectateurs, fussent-ils au nombre de cent, un bel objet quelconque, soit un homme, un quadrupède, un oiseau, ou une plante, tous conviennent aussitôt de sa beauté, quoique quelques-uns puis sent penser qu’il ne répond pas à leur attente, ou imaginer qu’il en est de plus beaux encore. Il n’y a personne, je crois, qui trouve une oie plus belle qu’un cigne, ou qui donne à ce qu’on appelle la poule de Frise la préférence sur le paon. Il faut remarquer en outre, que les plaisirs de la vue ne sont pas aussi compliqués, aussi confondus et altérés par des habitudes et des associations non-naturelles, que le sont les plaisirs du goût ; parce que les plai-