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DU SUBLIME

faut bien davantage qu’il se forme aucune image par le mot prochain ; car ce mot représente l’idée de plusieurs étés avec l’exclusion de tous, excepté un seul. Assurément l’homme qui dit étè prochain n’a point d’image d’une telle succession, ni d’une exclusion pareille. Enfin, ce n’est pas seulement de ces idées communément nommées abstraites, et dont on ne peut se former aucune image, mais encore d’êtres particuliers et réels que nous parlons sans que notre imagination s’en crée aucune image : c’est ce qu’on appercevra certainement en examinant son esprit avec attention. D’ailleurs, l’effet de la poésie dépend si peu du pouvoir d’exciter des images sensibles, qu’elle perdrait, j’en suis convaincu, une très-grande partie de son énergie, si c’était là le résultat nécessaire de toute description. Cette union de mots frappans, qui est le plus puissant des instrumens poétiques, perdrait souvent sa force, sa propriété et son exactitude, si les images sensibles se présentaient toujours. Il n’y a pas peut-être dans toute l’Énéide un passage plus achevé et plus grand que la description de la caverne de Vulcain, et de ouvrages que les Cyclopes y forgent. Virgile s’attache particulièrement à la composition de