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ET DU BEAU

prendre une impression dissemblable : d’ailleurs, chaque variation de l’objet est un repos, un relâche pour les organes de la vue, et ce délassement empêche cette puissante émotion si nécessaire pour produire le sublime. Ainsi donc, on ne donnera une véritable grandeur aux choses dont nous avons parlé, qu’en observant une parfaite simplicité, une uniformité absolue dans la disposition, la forme et la couleur. D’après ce principe de succession et d’uniformité, on peut demander pourquoi une longue muraille toute nue ne serait pas un objet plus sublime qu’une colonnade, puisque la succession n’y est nulle part interrompue, puisque l’œil n’y rencontre aucun obstacle, puisqu’en un mot, on ne peut rien concevoir de plus uniforme ? Certainement un long mur tout nu n’a pas autant de grandeur qu’une colonnade de la même longueur et de la même hauteur ; et il n’est pas bien difficile d’en trouver la raison. Quand on regarde une muraille nue, l’œil glisse sur cette surface rase, et en atteint le terme en un instant ; rien ne l’arrête dans sa course rapide, mais aussi rien ne le fixe assez long-tems pour produire un effet grand et durable. La vue d’une longue et haute muraille excite sans doute