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DU SUBLIME

La vue d’un bel oiseau éclaircira cette observation. Nous voyons augmenter sa tête insensiblement jusqu’au milieu, d’où elle s’amoindrit par degrés et se confond enfin avec le cou ; le cou se perd lui-même dans un plus grand renflement qui augmente jusqu’au milieu du corps, où commence un nouveau décroissement du tout, dont le dernier degré est à l’origine de la queue ; la queue prend une nouvelle direction, mais en change bientôt pour se lier aux autres parties ; ainsi la ligne, au-dessus, au-dessous, de tous côtés, est dans une variation continuelle. J’ai pris dans cette description une colombe pour modèle ; elle remplit la plupart des conditions de la beauté. Son plumage est uni, et garni du plus doux duvet ; ses parties sont, pour ainsi dire, fondues les unes dans les autres : on ne voit dans le tout aucune proéminence soudaine, et cependant le tout change sans cesse. Que l’on observe cette partie d’une belle femme, qui est peut-être la plus belle, je veux dire, le cou et le sein ; que l’on observe cette douceur, cette mollesse, ces contours aisés et insensibles, cette variété de la surface qui, dans le plus petit espace, n’est jamais la même ; ce dédale trompeur où l’œil s’égare, incertain, ébloui, ne sachant où se fixer, ignorant où il est en-