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DU SUBLIME

mour, ni aucune passion de cette espèce. Quand nous examinons le mouvement d’une montre, quand nous venons à connaître l’utilité de chaque partie, quoique très-convaincus de la convenance du tout, il s’en faut que nous apercevions rien de semblable à la beauté dans ce mécanisme ; mais que nous voyions sur la boite le travail d’un habile graveur, sans aucune idée d’utilité, nous en aurons une du beau, plus vive, plus distincte que n’aurait jamais pu nous la donner la montre elle-même, fut-elle le chef-d’œuvre de Graham. Dans la beauté, je l’ai déjà dit, l’effet précède toute connaissance de l’usage ; mais il faut savoir à quelle fin l’ouvrage est destiné, pour juger de la proportion. Suivant la fin, la proportion varie. Ainsi, il y a la proportion d’une tour et celle d’une maison ; la proportion d’une galerie, celle d’une salle, celle d’une chambre : et l’on ne peut décider des proportions de ces différens objets, avant de connaître le but qu’on s’est proposé en les construisant. Le bon sens et l’expérience réunis, découvrent ce qu’il convient de faire dans chaque ouvrage de l’art. Comme créatures raisonnables, nous devons, dans tous nos travaux, avoir égard à leur fin et à leur utilité ; la jouissance d’un plaisir, quelque inno-