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DU SUBLIME

ne peut apercevoir les bornes, qui par-là paraissent infinis, et produisent le même effet que s’ils l’étaient réellement. C’est ainsi que nous sommes trompés lorsque les parties de quelque grand objet, portées jusqu’à un nombre indéfini, sont disposées de telle manière que l’imagination ne rencontre aucun obstacle qui puisse l’empêcher de les étendre à volonté. Lorsque nous faisons une fréquente répétition de quelque idée, l’esprit, par une sorte de mécanisme, la répète long-tems après que la première cause a cessé d’agir [1]. Après avoir pirouetté, si l’on s’assied, on croit voir tourner autour de soi tous les objets environnans. A-t-on été attentif à une longue succession de bruits, tels que la chute des eaux, ou les coups redoublés des marteaux d’une forge ; les marteaux frappent, les eaux grondent dans l’imagination long-tems après que les premiers sons ont cessé de l’émouvoir ; et s’affaiblissant par des degrés presque imperceptibles, ces vains raisonnemens s’évanouissent enfin dans le silence. Si vous placez votre œil à l’une des extrémités d’un bâton droit dirigé vers le ciel, ce bâton vous paraîtra s’étendre à une longueur

  1. Voyez partie IV, sect. 12.