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DU SUBLIME

bonté envers les hommes. Tremble, terre ! à la présence du Seigneur, à la présence du Dieu de Jacob, qui changea le rocher en fontaine ! On n’en finirait pas si l’on voulait rapporter tous les passages des écrivains, soit sacrés, soit profanes, qui établissent l’universel sentiment des hommes concernant l’union inséparable d’une respectueuse et sainte terreur avec les idées de la divinité. De là cette maxime commune : primos in orbe deos fecit timor ; maxime que je crois fausse par rapport à l’origine de la religion. Le philosophe qui la conçut vit l’inséparable liaison de ces idées, sans considérer que la notion de quelque grande puissance doit toujours précéder la crainte que nous en avons. Mais la crainte doit nécessairement accompagner l’idée de cette puissance, dès qu’une fois cette idée est excitée en nous. C’est sur ce principe que la vraie religion a et doit avoir un si grand mélange de crainte salutaire ; et que les fausses religions n’ont, en général, d’autre appui que la crainte. Avant que la religion chrétienne eût, pour ainsi dire, humanisé l’idée de la divinité, et l’eût en quelque façon rapprochée de nous, on avait à peine parlé de l’amour divin. Les sectateurs de Platon en ont dit quelque chose, mais seulement quelque