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DU SUBLIME

de sublime. Mais est-ce ainsi que se présente à notre esprit l’animal qui, par le mouvement de ses narines, inspire la terreur ; dont le frémissement est semblable au tonnerre ; qui, bouillant d’ardeur et de rage, frappe la terre et l’enfonce ; qui s’élance au premier signal de la trompette, et se précipite au devant des hommes armés ? Dans cette description le cheval perd entièrement son caractère d’utilité, et l’on voit éclater ensemble le terrible et le sublime. Nous sommes sans cesse entourés d’animaux dont la force, quoique considérable, n’est pas pernicieuse. Ce n’est point parmi eux que nous devons chercher le sublime ; il nous assaille dans les forêts profondes, au milieu des déserts, sous la forme du lion, du tigre, de la panthère, du rhinocéros. Quand la force n’est qu’utile, quand elle est employée pour notre avantage ou pour notre plaisir, elle ne saurait être sublime ; car aucun objet n’agit d’une manière agréable pour nous, sans agir conformément à notre volonté ; mais pour agir en conformité de notre volonté, il doit nécessairement nous être soumis ; il ne peut donc être la cause d’une conception grande et puissante. Job nous a laissé une description de l’âne sauvage, qu’il a su rendre sublime en montrant cet animal