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ET DU BEAU.

ou non ; car il est impossible de regarder comme frivole ou méprisable une chose qui peut être dangereuse. Il y a quantité d’animaux qui n’étant pas à beaucoup près d’une grande taille, sont néanmoins capables d’exciter des idées du sublime, parce qu’on les considère comme des objets de terreur ; tels sont les serpens et presque toutes les espèces de bêtes venimeuses, Si aux objets doués de grandes dimensions nous attachons une idée accessoire de terreur, ils deviennent incomparablement plus grands. Une plaine très-unie et d’une vaste étendue n’est pas assurément une petite idée ; la perspective de cette plaine peut s’étendre aussi loin que la perspective de l’Océan : mais remplira-t-elle jamais l’esprit de quelque chose d’aussi grand que l’Océan même ? Ce dernier effet appartient à diverses causes, mais principalement à la grande terreur qu’inspire l’Océan. Il est certain que la terreur, dans tous les cas possibles, est plus ou moins distinctement le principe fondamental du sublime. Diverses langues fournissent de fortes preuves de l’affinité de ces idées. On y voit fréquemment le même mot employé à signifier indifféremment les modes de l’étonnement ou de l’admiration, et ceux de la terreur. Θάμϐοϛ signifie, en grec, crainte ou surprise ;