Page:Burke Edmund - Recherche philosophique sur l origine de nos idees du sublime et du beau - 1803.djvu/105

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
81
ET DU BEAU.

influence à beaucoup près si loin qu’on le croit communément.


SECTION XIV.
Effets de la Sympathie dans les malheurs de nos semblables.

Pour mieux nous rendre raison des effets de la tragédie, interrogeons-nous auparavant sur les sensations qu’excitent en nous les calamités réelles de nos semblables. Je suis convaincu que les infortunes et les souffrances réelles d’autrui nous donnent dans un très-haut degré ce délice dont nous avons déjà parlé : car, que la sensation soit ce qu’on voudra en apparence, si elle ne nous porte pas à fuir certains objets, si elle nous sollicite au contraire à en approcher, si elle nous y attache, dans ce cas je conçois que nous devons sentir un délice, ou un plaisir d’une espèce ou d’autre, à contempler des objets de ce genre. Ne lisons-nous pas les récits authentiques des scènes les plus désastreuses avec autant de plaisir que les romans et les poèmes dont la fiction a créé tous les incidens. La prospérité d’aucun empire, la grandeur d’aucun roi ne sauraient, à la lecture, agiter nos esprits