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ŒUVRES DÉCORATIVES : JULES ROMAIN, P. DEL VAGA.

De la sorte, Mantoue, outre les décorations multiples du Palazzo di Corte, possède la grande œuvre d’ensemble d’un maître. Pour les formes de voûtes et de plafonds, pour la distribution décorative, les nuances du coloris, la technique du stuc d’après le degré exact du relief, etc, ces deux édifices présentent, sinon un canon classique, du moins nombre de modèles d’une beauté originale.

Parmi les autres élèves de Raphaël, Perin del Vaga[1] a décoré le Palais Doria [a] à Gênes. La décoration y est encore très belle, mais un peu trop raffinée, et l’on n’y retrouve plus la grande et libre inspiration des Loges et de l’Appartement Borgia. Dans la galerie inférieure, un plafond droit, couvert de lourdes scènes de l’histoire romaine, au lieu de l’Olympe aérien de la Farnésine. Dans la Galleria, les ornements de la voûte, d’une grande élégance de détail et d’une grande finesse de coloris (au centre, des peintures ; aux angles, décoration en relief, gris sur bleu, gris sur or, etc. ; beaux motifs de rubans), mais sans grande subordination à l’architecture. Dans la salle des Géants, un riche encadrement d’une originalité très heureuse. Dans les neuf pièces, seules aujourd’hui visibles, du côté de la ville, des arabesques semblables, mais plus simples, encadrent les sujets mythologiques et allégoriques des pendentifs et des compartiments de la voûte ; ou bien ce sont encore des revêtements de stuc sans couleur[2]. Les murs, à l’exception de la Galleria, étaient tous destinés à être tendus de tapisseries.

Perin del Vaga a eu à Gênes même des successeurs, qui, sans être à dédaigner, ne l’ont cependant jamais égalé, et ne cherchèrent à imiter de lui que ses effets. L’œuvre la plus complète à cet égard est la décoration intérieure du Palais Spinola [b] (Strada S. Caterina, No 13), ou encore le rez-de-chaussée du Palais Pallavicini [c] (Piazza Fontane amorose). Généralement, dans les galeries inférieures et les escaliers des anciens palais, on voit se reproduire un système de maigres arabesques avec de rares figures de fantaisie sur fond blanc, comme il convenait à des pièces généralement assez obscures. Souvent les décorations servent de cadre aux peintures mythologiques ou historiques du centre. Parfois aussi la décoration peinte prend plus de place que ne le comportent ces pièces, et surtout le choix des sujets et la manière de les traiter montrent plus de réalisme que ne le souffre un plafond.

Nous avons une idée des anciennes arabesques et des meilleures dans les galeries inférieures, les escaliers et les vestibules supérieurs du Pal. Imperiali [d] (Piazza Campetto), du Pal. Lercari [e] (aujourd’hui le

  1. Il y a de lui des peintures dans plusieurs pièces du fort Saint-Age, de même que des travaux en stuc de Raff. da Montelupo. D’après Vasari, il exécuta à Rome nombre d’œuvres décoratives plus petites, de toute espèce, dont beaucoup existent sans nom. Une jolie galerie d’escalier [f], Via Paoia, No 51. — Au Palais Aldoviti, près du pont Saint-Ange, deux chambres en bas d’un charme réel.
  2. Pour les travaux de stuc, Perin employait Silvio Cosini, de Fiesole.