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ŒUVRES DÉCORATIVES : TRÉVISE, PADOUE, VICENCE.

(† 1466), d’une ordonnance toute florentine, attribué à Vellano. Le chœur tout entier est entouré d’une paroi de marbre, dont le dessin trahit la manière de Donatello ; puis il contient, à gauche, près de l’autel, une des œuvres décoratives les plus fameuses de toute la Renaissance, le grand candélabre de bronze [a] d’Andrea Riccio (1507).

Ce travail résume tout le savoir et toute la puissance ornementale de la Padoue d’alors : pour la conscience, la solidité, le goût du détail, il n’a guère son pareil. Mais le mieux est l’ennemi du bien : la division du candélabre a le double d’étages et de retraits qu’aurait un candélabre antique de même taille, et les divers compartiments sont entre eux de proportions trop pareilles. Ce défaut est doublement sensible à cause de la teinte foncée du bronze. Regardez le candélabre à dix pas de distance, et qu’on imagine à côté le candélabre du Vatican d’égale grandeur : on jugera de la différence d’effet des deux silhouettes[1].

La chapelle [b] du Santo, d’ailleurs, est un vrai bijou de la Renaissance. L’architecture et la décoration, brillante, sans être toujours pure, de presque toutes les parties de l’édifice (arabesques plates d’une grâce charmante), commencées par Giovanni Minello et son fils Minello, ont été continuées par Jac. Sansovino, et achevées seulement en 1553 par Falconetto. Le riche pilastre d’angle, à gauche, est l’œuvre de Girolamo Pironi, au XVIIe siècle encore, à la place d’un orgue enlevé, Matteo et Tommaso Allio, de Milan (vers 1652), ajoutèrent le pilier à droite, en imitant librement la manière du modèle. Si une partie de l’œuvre décorative appartient à Jac. Sansovino, ce sont plutôt les belles arabesques de la voûte, exécutées par Tiziano Minio. Quant à l’attribution des demi-figures en relief des apôtres, dans les lunettes de la voûte, l’auteur évite de se prononcer.

Aux Eremitani [c], se trouvent différents encadrements d’autel, en terre cuite de couleur, qui ont de la grandeur et de la richesse (commencement du XVIe siècle).


Vicence est particulièrement riche en magnifiques encadrements de tableaux d’autel, à l’aide d’architectures en marbre ou en terre cuite. Comme à Vicence et à Vérone, à l’époque du gothique, et même plus tard, les nefs latérales des églises n’avaient pas de fenêtres, ou du moins n’avaient que de toutes petites ouvertures rondes, il restait beaucoup de place pour les décorations de ce genre. S. Lorenzo [d] renferme à cet égard plusieurs travaux de mérite ; mais surtout S. Corona [e]. Dans cette dernière église, le cinquième autel à gauche est une des œuvres les plus éclatantes de

  1. Le tombeau Torriani, à S. Fermo [f] de Vérone, est tout entier de Riccio (chapelle près du transept gauche) ; les reliefs de bronze autour du sarcophage sont restés à Paris, au Louvre. La partie décorative : en bas, un ordre de colonnettes à panse ; en haut, des sphinx de bronze portant le sarcophage, est, il est vrai, soignée et gracieuse, mais la composition, pour un tombeau, évoque peut-être trop l’idée d’un meuble.