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ŒUVRES DÉCORATIVES : FLORENCE.

qui a beaucoup travaillé à Florence et à Rome. Mino, dans quelques travaux florentins, approche très près de son maître : voir le tombeau du comte Hugo d’Andeburg (1481) à la Badia [a] ; le tombeau de l’évêque Salutati (avant 1464). dans la cathédrale [b] de Fiesole ; le tabernacle de la chapelle Médici, à S. Croce [c], etc. — Les travaux de Mino à Rome ne répondent pas tout à fait à ses œuvres de Florence. Il en sera questien à propos de la Renaissance à Rome.

Benedetto da Majano(1442-97) est l’auteur de la chaire de S. Croce [d], légère et magnifique, un des chefs-d’œuvre de l’art décoratif (vers 1475). Pour ne pas altérer sans doute la délicatesse de l’ouvrage, le maître a ingénieusement dissimulé l’escalier dans le pilier même ; l’entrée est par une belle petite porte de derrière, ornée de marqueterie. Le plus beau ciboire de marbre que possède l’Italie, dans la cathédrale [e] de Sienne (attribué d’abord à Michel-Ange), est aussi de la main de Benedetto. Il y en a une réplique, plus petite, dans la cathédrale de S. Gimignano. — Il faut citer encore, comme des perfections en leur genre, la porte de marbre de la Sala de’ Gigli [f] du Pal. Vecchio, avec frises et chapiteaux d’un travail de figures et d’ornements très délicat. Le revers de cette porte, dans la Sala di Udienza [g], est plus simple, mais d’une beauté sans égale. Le tombeau de Fil. Strozzi à S. Maria Novella [h], de même que les autels de Faenza [i] et de S. Gimignano [j], offrent aussi de charmants motifs de décoration, bien que la maigreur de l’ornement, l’application à la décoration des arcs des motifs propres aux pilastres, etc., annoncent déjà la décadence de la plastique florentine au sortir du XVe siècle. Il a déjà été question (v. p. 107) des portes magnifiques faites à Naples par Giuliano, le frère de Benedetto. — Nous aurons encore l’occasion de parler de l’un et de l’autre comme décorateurs sur bois.

Giuliano da Sangallo est l’auteur des deux beaux tombeaux de la chapelle Sassetti à S. Trinità [k]. Ce sont peut-être les plus riches exemplaires en ce genre (v. p 143) ; les reliefs gracieux offrent aussi de l’intérêt. (Copies d’après des motifs de sarcophages antiques, etc.)

Les décorations de la Chartreuse [l] sont de maîtres inconnus. Dans le nombre citons un travail remarquable, et de la première époque, rappelant la manière de Brunellesco : la fontaine de la troisième cour, en forme de sarcophage reposant sur des dragons enroulés. À citer encore le pupitre de lecture au réfectoire.

Les travaux de Benedetto da Rovezzano (1474-1554) marquent, dans la décoration de marbre, l’accentuation de la rudesse, de l’ombre et de la force, avec une perte sensible de fraîcheur et de grâce. Voir le cénotaphe de Pierre Soderini (de 1513) dans le chœur du Carmine [m], la cheminée du Pal. Rosselli del Turco, au Musée national [n], et le tombeau d’Oddo Altociti (mort en 1507) dans la proche église des SS. Apostoli [o] (nef gauche). L’arabesque cherche ici à s’accorder avec le profil d’architecture devenu plus expressif ; elle se simplifie et accuse son re-