On regrette parfois que Brunellesco et Alberti n’aient pas rencontré les temples grecs au lieu des monuments romains ; mais on oublie qu’ils demandaient à l’antiquité moins un nouvel art de composer qu’un nouveau mode d’expression du détail. Le principal, ils l’apportaient eux-mêmes, et dès lors les formes romaines, plus souples, se prétaient certainement mieux à leur dessein.
Longtemps déjà la Renaissance avait attendu à la porte ; dans les constructions romanes du XIIe et du XIIIe siècle en Toscane, dans les fresques de Giotto et de son école (chapelle est de S. Croce [a] à Florence) se rencontrent parfois des formes de détail d’une pureté presque antique. Puis était venu le style gothique importé du Nord : c’était en apparence un temps d’arrêt ; mais, grâce à son système de piliers et de voûtes, ce style devait être, pour la partie mécanique de l’art, une école incomparable. L’ogive fut comme un prétexte pour résoudre les problèmes les plus difficiles : à cette ombre, se développa, comme il a été dit plus haut (p. 44 et suiv.) le sentiment proprement italien de l’espace, des lignes, des proportions ; et tel fut le legs que la Renaissance reçut en héritage. Elle sut l’apprécier, et ce n’est pas sans motif que Michel-Ange appelait S. Maria Novella « sa fiancée ».
Pour le XVe siècle, il faut encore avoir égard à une tendance particulière dans les formes du temps. L’esprit de fantaisie qui anime cette époque s’exprime dans l’art par un goût souvent exagéré de l’ornementation, à qui parfois, même en architecture, tout le reste est sacrifié. De la sorte, le caractère de l’époque est essentiellement décoratif. Les bons artistes pourtant ne se laissèrent pas dominer ; d’ailleurs, ce goût même de la décoration obéissait en quelque mesure, à un idéal de beauté, et il a duré pendant près d’un siècle sans se corrompre. On peut distinguer deux périodes dans la Renaissance proprement dite. La première va de 1420 à 1500, et peut être appelée l’ère des recherches. La seconde irait à peine jusqu’à 1540 ; c’est l’âge d’or de l’architecture moderne, qui, dans les plus hautes tâches, maintient l’harmonie entre les formes principales et la décoration confinée en ses limites. — À partir de 1540 apparaissent déjà les premiers indices du style baroque, lequel s’en tient exclusivement aux masses et aux proportions, et traite arbitrairement le détail comme un organisme de pure apparence. Le talent même d’un Michel-Ange, d’un Palladio, d’un Vignola, d’un Alessi, d’un Bicchini, d’un Bernin, n’a pas suffi pour produire une œuvre vraiment maîtresse. Hors de l’absolu, pourtant, ces hommes ont un mérite impérissable ; nous y reviendrons plus loin.
Le développement de l’architecture de la Renaissance repose d’abord sur l’énergie de quelques maîtres de premier ordre : quant aux œuvres, elles sont parfois inachevées, mutilées, souvent même presque entièrement anéanties. De là tant de lacunes, tant d’énigmes, tant de vues