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soient sur la terre d’Italie. Les chambres souterraines de la Villa Mills (Spada), aujourd’hui un cloître de femmes, renommées pour l’effet magnifique de leurs peintures, sont inaccessibles. Dans les édifices qu’on appelle habituellement aujourd’hui Palazzi de’ Cesari [a], est une masse énorme de ruines, en partie de dimensions gigantesques, parmi lesquelles le stade, avec une niche qui a encore ses caissons, des constructions avancées qui regardent le Cireus Maximus, dont les jeux pouvaient être vus de là comme d’une loge (la plupart de ces bâtiments sont du temps de Domitien) ; la longue et double rangée de voûtes dans la direction du Cœlius n’était qu’un soubassement sur lequel s’élevait le palais, celui de Septime-Sévère peut-être. De l’aqueduc qui, dans cet ensemble de palais, alimentait les fontaines et les bains, quelques arches puissantes restent encore debout[1]. Des fouilles étendues, pratiquées encore ici, ont mis au jour des salles et détruit beaucoup du charme pittoresque des ruines. Les restes de décoration sont généralement insignifiantes.

Il reste assez du Palais et des jardins de Salluste (commençant derrière la Piazza Barberina) [b] pour qu’à l’aide de renseignements on puisse se faire une idée brillante de l’ensemble.

On sait qu’un agréable livre de Mazois, traduit dans toutes les langues, a fait pour le Palais de Scaurus [c], sur le mont Cœlius, cette restauration idéale ; au lieu et à la place même, on n’en trouverait cependant plus une pierre.

La Villa d’Adrien, au-dessous de Tivoli [d], exige dans son état présent, après la perte complète de son revêtement de pierre et de ses colonnades, une grande imagination, si l’on veut reconnaître la destination ancienne de chacune des pièces, souvent bien insignifiantes. Adrien avait reproduit ici en petit les endroits les plus célèbres du monde antique, et élevé un petit modèle de chaque espèce d’édifice romain d’apparat ; le tout sur une étendue d’un peu plus d’une lieue. Si d’autres personnages qui aimaient à bâtir réalisaient des fantaisies semblables, on devine quelle difficulté on doit avoir à expliquer avec clarté la nature des ruines de certaines villas et palais romains. D’après les dernières fouilles, on peut restaurer en esprit, avec une certitude approximative, le teatro maritimo, dont il reste une rangée de colonnes et d’autres détails d’architecture. (Les indications de la carte de Fea sont d’une exactitude douteuse.)

Parmi les ruines des villas de la campagne romaine, en partie gigantesques et extraordinairement étendues, la rotonde Tor de’ Sehiavi [e]

  1. Qu’on remarque à cette occasion l’habitude romaine de pratiquer dans les façades de grandes niches avec demi-coupoles, dont une, par exemple, en face du cirqne, sert de loge impériale. On retrouve ces niches sur la façade (actuelle) des Thermes de Diociétien [f], etc. ; puis, à l’époque chrétienne, au palais de Théodoric à Ravenne ; comme réminiscence, aux portails de S. Marco à Venise. Elles sont fréquemment employées, et avec des dimensions colossales, dans les monuments de l’islamisme, surtout aux Indes orientales ; enfin avec l’effet admirable que leur donna Bramante, elles servent de motif principal an Giardina della Pigna (Vatican).