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style aux verts feuillages et aux velariums étendus au-dessus de chaque pièce, et l’on se représentera un ensemble qui à la vérité n’a pas le confortable et le charme des habitations du Nord, mais le confortable et le charme très enviable d’une installation méridionale. On est toujours très incertain sur la manière dont prenaient jour la plupart des pièces qui environnent la cour ; la partie supérieure est en général détruite et les fenêtres sont extrêmement rares. La porte qui donnait sur la cour ne devait laisser pénétrer qu’une lumière très insuffisante, car le portique couvert prenait devant la porte le meilleur de l’espace. Et cependant les peintures de l’intérieur, excellentes en partie, n’ont pu être exécutées à la lumière de la lampe ni en vue de cette lumière. Un jour d’en haut, peut-être une ouverture dans le toit, couverte d’une petite lanterne ou loggia, telle serait la meilleure hypothèse pour résoudre la difficulté[1]. En tout cas, c’est chose significative que toutes les pièces accessoires destinées à chaque personne ou à certains usages particuliers le cèdent aux salles communes : le tablinum et le triclinium ; les portiques, spécialement, étaient l’orgueil de la maison. Il serait injuste d’exiger de leurs colonnes le style grec dans sa pureté, car l’endroit aussi bien que la condition modeste des propriétaires exigeaient l’emploi du stuc, qui altère toujours les formes à la longue ; il faut en revanche admirer le sens esthétique qui s’attachait toujours avec une fidélité relativement aussi grande à ce qui jadis avait été proclamé beau. L’œil ne doit pas sans doute s’habituer aux cannelures convexes, aux colonnes engagées qui font saillie, au chapiteau ionien bâtard dont nous avons souvent parlé, aux piliers octogones et à bien d’autres formes douteuses ; il ne faut pas non plus en être trop fortement choqué, mais songer au grand ensemble riche en couleurs dont elles n’étaient autrefois que des parties, et à la manière dont elles se soutenaient ou se balançaient. Combien les simples dessins de mosaïque par terre nous préparent déjà à cette richesse architecturale[2] ! La Casa del Fauno [a] seule se présente comme habitation de luxe construite selon toutes les règles de l’art ; mais aussi la Casa del Poeta tragico [b] par exemple, le beau jardin avec portique de la Casa, de’ capitelli figurait [c] la Casa del Labirinto [d] et la Casa di Nerone [e] avec leurs triclinia par derrière ; la Casa di Pansa [f] et son magnifique péristyle ; la Casa della Ballerina [g] avec sa gracieuse arrière-cour rafraîchie de petites fontaines, ornée de statuettes, tapissée de vigne ; la Casa di Meleagro [h], une des plus vastes, et tant d’autres maisons, donnent au plus haut degré cette impression particulière qu’on pourrait appeler le charme pompéien. Car Pompéi semble né d’un seul jet, et parfois la moindre maisonnette pro-

  1. La Casa di Castore e Polluce [i] offre un exemple d’un motif architectural figurant une sorte de loggia avec fenêtres d’où tombe la lumière.
  2. Une maison de la Strada dell’Abbondanza nons présente un motif de frontons et d’arcs bombés alternant comme couronnement des fenêtres.