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qui concerne l’illusion, le raccourci, la lumière, le reflet, etc. Dans les mosaïques, qui, selon qu’elles sont destinées à servir de dallages ou de décorations murales, ne sont exécutées qu’en pierre ou pâtes de verre, on peut suivre toute une gradation dans la manière d’user des couleurs, à partir des procédés les plus simples jusqu’aux plus parfaits (comp. p. 185, U, les scènes de théâtre, par Dioscuride).

Il faut se garder de penser que les meilleures choses soient généralement imitées d’originaux grecs que l’artiste apprenait par coeur, pour les reproduire plus ou moins librement. Les peintres praticiens auraient, il est vrai, trouvé de fréquentes occasions de copie dans la masse des peintures grecques. Ils avaient sans doute des livres d’esquisses ; mais, selon la coutume grecque, loin de les copier seulement, ils les modifiaient avec liberté. Les esquisses d’ailleurs étaient généralement empruntées à d’illustres modèles. Les peintures dont la composition romaine peut être démontrée (p. ex. les Scènes de la vie municipale de Pompéi [a], dans la 4e salle, sur le mur du côté droit, XXXVIII, et les deux Fêtes d’Isis [b], 3e salle, pilier XXI) seront toujours, même si leur exécution plus médiocre était simplement due au hasard, de beaucoup inférieures au reste.

Si nous prenons pour mesure les grands tableaux à sujets mythologiques (surtout ceux des cinq salles de l’entrée), nous trouverons pour l’exécution à peu près les résultats suivants. Le détail n’est jamais achevé jusqu’à la pleine réalité, tandis que ce qui est essentiel est rendu avec une grande énergie et en peu de lignes. Dans les têtes il se trouve, à côté des traits caractéristiques, des traits simplement généraux que pourtant l’on pourra mettre au compte de l’artiste et surtout de sa technique. Cette dernière n’est plus un secret maintenant : la grande majorité des tableaux de Pompéi sont des fresques murales. La peinture paraît partout très libre et hardie. Généralement l’espace ne suit pas la réalité extérieure, mais les besoins plus élevés de la composition ; le fond, formé par un édifice ou par un paysage, n’est la plupart du temps que simplement indiqué (Sacrifice d’Iphigénie [c], dans la 4e salle, près du pilier XL) ; la perspective, est conçue arbitrairement de telle sorte que les figures éloignées paraissent comme sur un plan élevé (Reconnaissance d’Achille [d], même salle, comp. XXXIX). La lumière ne vient constamment que d’un seul côté. Le groupement artistique de la peinture moderne avec ses transitions dans les formes et ses contrastes dans les masses lumineuses manque ici ; ce qui perce surtout, c’est le désir de rendre les figures elles-mêmes aussi parlantes que possible, par conséquent de les tenir séparées. Les groupes à figures nombreuses paraissent, là où ils se trouvent, ordonnés par couches (le Poète qui apprend son drame 'aux acteurs [e], dans le corridor de la salle 5, XXXV). Somme toute, on trouvera toujours de grandes inégalités ici, de même que dans le reste des grandes compositions. Il y en a quelques-unes dans lesquelles