Page:Burckhardt - Le Cicerone, 1re partie, trad. Gérard, 1885.djvu/21

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

complexité, — et qu'il recueille le bénéfice de cette composition savante sans en avoir la peine.

Le Cicerone présente ainsi un tableau complet de l'art antique et moderne en Italie, et un répertoire des œuvres d'architecture, de sculpture, de peinture, depuis les temples de l'ancienne Poseidonia, les restes de la vieille statuaire étrusque et les fresques du Musée de Naples, jusqu'aux architectures de Borromini, aux statues du Bernin, aux peintures des Carrache et du Caravane. Le vaste et magnifique Musée d'Italie est tout entier décrit et classé. Et ici, je dois relever l'ingéniosité des moyens à l'aide desquels le Cicerone est adapté à son office de guide. Un habile système de notation et de chiffres, à propos de chaque œuvre, de chaque nom d'artiste et de ville, renvoie le lecteur à des tables très exactes ; en sorte que, d'une part, il embrasse d'un coup d'œil tout ce que chaque ville contient, et que, d'autre part, il peut rapidement se rendre compte de ce que chaque artiste a produit. Le voyageur qui, le Cicerone à la main, arrive à Florence, par exemple, a, dans les quinze pages du Registre des villes (Ortsregister), la liste des églises, musées, palais, villas, ainsi que des architectures, statues, tableaux, qui y sont renfermés. Et s'il lui plaît de savoir ce qu'un maître tel que Raphaël ou Michel-Ange a créé, quelques chiffres à la suite de ces deux noms, dans le Registre alphabétique des artistes (Register der Künstlernamen), lui indiquent où il trouvera l’énumération et la description de leurs œuvres. Les rubriques sont faciles, commodes ; et ce livre, vraiment scientifique, est ainsi rendu propre, sans que le caractère de l'ouvrage en soit le moins du monde altéré, à être comme le vade-mecum du touriste dilettante.

Burckhardt se défend, dans sa préface, d'avoir cherché d'autre objet que d'indiquer au lecteur les richesses artistiques de l'Italie, et de le préparer à les mieux goûter. Il définit lui-même son ouvrage, une « introduction à la jouissance des œuvres d'art en Italie ». Il n'a pas, dit-il, prétendu analyser et approfondir l'idée même des œuvres que les mots seraient impuissants à exprimer, et qui, selon lui, parlent toutes seules. Il ne veut que nous placer devant elles, et il attend qu'en leur présence s'éveille le sentiment qu'elles doivent inspirer. Cette liberté, ce loisir laissé à l'impres-