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Parmi plusieurs statuettes de ce genre (quelques-unes dans la Galleria de’ Candelabri du Vatican [a], et en d'autres endroits), deux surtout doivent être citées ; elles se trouvent au Musée de Naples (2e corridor), et l'une d'elles porte l'inscription de Moschion [b] ce sont de charmantes figures dont le geste et la draperie sont pleins de vie ; elles n'ont pas été conçues pendant un discours solennel, mais bien plutôt au moment d'un enseignement calme, commodément adossées en arrière et tenant des manuscrits dans les deux mains, Enfin l’Anacréon douteux dans la salle des Muses de la Villa Borghese [c], et Aristide le Smyrnien au Museo Cristiano du Vatican [d], tous les deux importants dans leur genre.

Le « Jupiter » des Uffizi de Florence [e] (2e corridor) pouvait être avant sa restauration un philosophe grec, mais en tout cas d'exécution romaine. Il est debout, la poitrine nue, la main gauche cachée sous son manteau et appuyée sur la hanche.


Les têtes des Grecs célèbres ont naturellement été conservées en plus grand nombie que les statues entières, mais des séries entières en ont dû être retouchées à l'époque romaine. La véritable forme grecque de portraits, auxquels on ne voulait pas consacrer une statue entière, était l'hermès, c'est-à-dire un pilier à hauteur d'homme ou à peu près (et même coupé verticalement), dont l'extrémité supérieure représentait une tête avec une partie très restreinte de la poitrine et des épaules. Cependant, parmi les Grecs célèbres, il y a dans les galeries des têtes avec le cou, des têtes avec la draperie romaine on moderne, de véritables hermès, des fragments, des statues, etc. ; un mélange que nous pouvons démêler d'autant moins qu'ici les choses les plus importantes seules doivent être mentionnées par leur nom.

À la tête des portraits grecs se trouve à bon droit le type d’Homère. Il est clair qu'il ne peut être question d'un portrait authentique ; l'art seul a créé cette tête. (Bel exemplaire au Musée de Naples [f], 3e corridor ; un autre, bon aussi, à côté de plus médiocres, dans la salle des Philosophes du Museo Capitolino [g] ; une bonne tête de bronze, en mauvais état, aux Uffizi de Florence [h], Bronzes, 1re salle.) Je confesse que rien ne me donne une plus haute idée de la sculpture grecque que la conception et la représentation de ces traits. Un poète et un aède aveugle, voilà toute la donnée. Mais l'art a mis sur le front et les joues du vieillard le signe de l'inspiration, cette tension pleine de pressentiment divin, et cependant l'expression de cette paix absolue dont jouissent les aveugles. Dans le buste de Naples, chaque coup de ciseau exprime l'esprit et une vie merveilleuse.

Immédiatement après Homère, il faut placer le célèbre buste de bronze du Musée de Naples (grands bronzes), que l'on a pris pour le portrait de Platon [i]. Il est très sûr pourtant que c'est là une représentation de