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nélas et son épaule, ainsi que les jambes traînantes de Patrocle (admirablement faites) au Vatican [a] (salle des Bustes) ; 3o le groupe complet, dans l’une des cours du Palais Pitti à Florence [b] (à gauche, dans la grande cour), est peut-être un ouvrage grec ; de la tête de Ménélas, le casque seul est en partie moderne, ainsi que le haut du corps de Patrocle presque entier, les deux bras, toutes les parties inférieures, la base et le socle ; 4o l'exemplaire de la Loggia de’ Lanzi à Florence [c], moins important est aussi fortement restauré[1]. (Abbozzo en cite, attribué à Michel-Ange, dans la Casa Buonarotti.) — La tâche était des plus sublimes : celui des chefs d’armée qu’on se représente le plus fougueux, devant Ilion, en plein combat, et abandonnant la lutte pour sauver un mourant ; une donnée d’efforts corporels puissants et en même temps de grande tension d’esprit. Tout cela est étroitement uni dans ce groupe pyramidal, qui est cependant on ne peut plus net dans les détails et animé des plus beaux contrastes. (Le bras droit du mort repose encore sur l’épaule de Ménélas d’après la restauration exécutée par le sculpteur Von der Launitz)[2].

Cependant des problèmes plus élevés encore devaient être posés et résolus.


Le groupe de Laocoon, au Belvédère du Vatican [d], est décrit par les grands esprits de notre nation et interprété avec une profondeur qui n’a peut-être jamais été appliquée à aucune autre œuvre d’art. Le sujet en est universellement connu, ainsi que le nom des artistes, Agesandre, Polydore et Athénodore de Rhodes. Aujourd’hui il est presque universellement reconnu que l’œuvre appartient au temps des Diadoches et non à l’époque de Titus, dans les thermes duquel (1506) elle a été trouvée. Le bras droit de Laocoon, la main droite du fils aîné, le bras droit du plus jeune, la plus grande partie du serpent (celui qui est en haut), plusieurs parties des extrémités conservées, sont restaurées. Tout le groupe a été repoli, comme la plupart des œuvres exhumées du xvie siècle, cependant on distingue avec la plus grande netteté les coups de ciseau primitifs non polis.

Nous n’avons pas à expliquer l’œuvre, mais à dire simplement comment chacun peut le mieux l’approprier à son esprit. Tout d’abord, ce dont on doit clairement se rendre compte, c’est le moment, dont le choix et la signification n’ont plus leurs pareils. On trouvera que celui-ci consiste dans un concours incomparable de périodes de degrés divers. En même temps, les caractères se développent en une expression qui atteint son degré suprême dans la tête du père. En y regardant de plus près, on se convaincra que les sujets dramatiques sont en même temps les plus beaux sujets plastiques, et que l’inégalité d’âge, de taille et de vigueur

  1. Ajax seul est figuré, presque dans la même pose, par un bronze du Musée de Parme [d].
  2. Pour le groupe des Meurtriers du tyran au Musée de Naples, v. plus haut, p. 84 f.