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lien de « faune » ne peut qu’induire en erreur, et l’on fera bien de l’éliminer.) Leur signe distinctif est le nez camus, plus ou moins marqué, les oreilles un peu pointues, souvent aussi une petite queue et deux amygdales saillantes ; en fait de vêtement, une peau de bête. Mais dans cette seule espèce on remarque déjà la gradation la plus variée. Le plus noble, qui se tient le plus près de Bacchus, c’est le satyre qui vient de jouer de la flûte ; il s’appuie contre un tronc d’arbre, quelquefois il porte une couronne ; c’est un des motifs les plus gracieux et les plus sympathiques de l’art antique, imité probablement du Satyres Periboëtos de Praxitèle. Les exemplaires qui nous ont conservé cette œuvre sont innombrables ; le meilleur de l’époque romaine est au Museo Capitolino [a] (salle du Gladiateur mourant)[1] ; d’autres bons exemplaires sont au Braccio Nuovo du Vatican [b] et à la Villa Borghese [c] (salle du Faune). Deux reproductions romaines médiocres (au Palais Pitti, à Florence, vestibule intérieur au-dessus de l’escalier principal), joignent au Periboëtos un petit Pan [d] ; cette adjonction rompt l’isolement, qui est essentiel pour l’expression spirituelle de la figure. — La prédominance de la jouissance ne se montre dans le Periboëtos que par la rondeur des traits et par le ventre un peu proéminent, la malice ne se lit que dans un trait à peine visible de la figure.

Comme copie d’un original non moins célèbre dans l’antiquité du même Praxitèle, et d’une facture très distinguée, il ne faut pas omettre le Satyre échansont de la Villa Ludovisi [e]. Un torse excellent, malheureusement mutilé, est au Vatican (Galleria de’ Cantelabri, no 11).

Son frère, plus jeune encore, est le Satyre enfant qui va jouer de la flûte, ou vient de s’interrompre, ce qui est difficile à distinguer à cause des restaurations. Il est adossé et ses jambes sont croisées. On en voit de bons exemplaires au Braccio Nuovo du Vatican [f], dans la galerie supérieure du Museo Capitolino [g] et ailleurs. Un autre, de moindre importance, est dans la salle ovale de la Villa Albani [h]. Aucun ne répond la grâce de l’original. Un fragment est dans la Galerie de Parme [i] (l’« Amortorso ») qui s’y trouve aussi est plutôt un satyre). Les satyres enfans, dont il nous reste quelques têtes charmantes, ont une expression insouciante, ou impertinente et moqueuse ; une petite tête, presque innocente et qui rit gaiement, est dans la galerie supérieure Museo Capitolino [j] ; nombre d’autres têtes, avec des expressions différentes, sont au Musée Chiaramonti du Vatican [k].

Parmi les figures de satyres les plus nobles est, en général, celui qui porte sur son épaule Bacchus enfant. Sa démarche légère et son rire, son corps élancé et souple, mû comme par un ressort intérieur, le distinguent essentiellement du Periboëtos et le rapprochent déjà des autres satyres.

  1. Un des plus beaux torses (peut-être l’original même de Praxitèle) a été trouvé au Palatin ; maintenant il est à Paris ; le moulage en plâtre est au musée des fouilles françaises du Palatin [l].