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SCULPTURE ANTIQUE.

est de Benvenuto Cellini, mais primitivement c’était bien un Ganymède. Les formes et la pose sont également gracieuses.

Certaines statues qui représentent Ganymède tout enfant font ressortir la proportion de l’aigle avec l’enfant d’une manière amusante et naïve : telle est la statue admirablement conçue du petit Ganymède qui par derrière entoure l’aigle de ses bras, à la Galleria de’ Cantelabri du Vatican [a].


La galerie des figures divines est glorieusement complétée par Bacchus (Dionysos), le dieu de la suprême volupté de la nature. Pendant longtemps l’art en avait fait un dieu barbu ; il reçut au temps de Skopas et de Praxitèle les traits de la plus douce jeunesse ; et son cortège, jusque-là burlesque (voir les satyres sur les vases très anciens), s’élève jusqu’au beau par une gradation riche et caractéristique. Lui, qui donne le ton et forme le centre de ce groupe de figures variées (Thiasos), reçut un type de beauté dont l’expression parfaite résulte du mélange des formes viriles et féminines. Ainsi est né ce type merveilleux d’une félicité infinie et sans bornes, dont le trait le plus intime est, comme chez Aphrodite, une nuance de tristesse voluptueuse. À ce caractère convenait avant tout une attitude aisée et tranquille favorable au développement de formes riches : c’est ainsi qu’on le représente appuyé sur un cep de vigne qui devient plus tard un jeune satyre, ou bien assis et se tournant légèrement. Le thyrse, dans les statues où il existe, sert plutôt d’ornement que d’appui. La tête, ordinairement un peu inclinée, est ombragée par une couronne de pampres et de lierre, et entourée de magnifiques boucles que retient un diadème. À l’exception d’une peau de bête, Bacchus est nu, en général, mais souvent aussi on le représente drapé à partir des hanches. En regard de ce type, le Bacchus barbu continua de subsister, mais modifié et raffiné.

Dans les collections italiennes, le premier rang appartient sans conteste au Torse assis du Musée de Naples [b] (3e corridor), parce que les formes douces et délicates du dieu y sont traitées d’une manière plus simple et plus distinguée qu’ailleurs. Un autre torse assis, d’un beau travail, est au Vatican [c] (Galleria delle Statue). Le torse d’un Bacchus debout, d’un très bon style romain, restauré en Apollon, se trouve dans le vestibule intérieur des Uffizi de Florence [d]. — Une statue, dans la Sala della Biga du Vatican [e], est intéressante par ses formes absolument féminines.

Mais le caractère parfait de la beauté de Bacchus ne pouvait pas être révélé d’une manière plus saisissante que par le contraste entre le dieu et l’un de ses compagnons. L’art a personnifié le cep de vigne (Ampelos) sur lequel le dieu s’appuyait, et en a fait un satyre avec lequel Bacchus a certaines relations caractéristiques : il lui parle ou s’appuie sur lui ; parfois ce motif est traité avec une visible intention d’humour : Ampelos ne