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du corps qui se retourne, a plus de genre et de vérité que d’idéal, et ne nous met pas devant les yeux le caractère divin.

Une autre statuette (salle 2 des Bronzes) est d’une conception plus élevée. Elle représente Vénus drapée depuis les hanches [a] ; elle arrange ses cheveux, elle semble même occupée à les sécher après le bain. C’est une figure très élégante et du meilleur style. Elle a pour analogue une gracieuse petite figure de marbre souvent reproduite. (Mais il faut dire que les bras et l’extrémité des boucles de la chevelure sont restaurés.) Elle est au Braccio Nuovo du Vatican [b] et date de la bonne époque romaine. D’autres petits bronzes, très jolis, qui représentent la déesse dans une occupation semblable, mais toute nue, la montrent peut-être au moment où elle dénoue ses cheveux (Uffizi [c], deuxième salle des Bronzes, vitrine 2). La Vénus dite Uranie (Uffizi [d], salle des Inscriptions) est une Vénus au type juvénile qui se prépare au bain. Abstraction faite des restaurations, ses mouvements semblent indiquer qu’elle est sur le point de détacher de la main gauche le vêtement légèrement ceint autour de ses hanches, et de dénouer ses cheveux de la main droite. L’exécution est admirable, mais il est douteux qu’elle soit grecque. Les parties conservées de la tête ont un charme qui fait penser à la Psyché de Capoue. D’après une hypothèse récente, le motif serait une œuvre de Praxitèle, la Vénus de Cos (?)[1].

Plus tard, quelques motifs nouveaux sont venus s’ajouter à ceux dont nous venons de parler. Ni la pensée ni l’exécution n’en sont heureuses. Peut-être avait-il l’intention d’être original, cet artiste qui sculpta la Vénus de la Villa Borghese (salle de Junon) en train de se laver avec une éponge, tandis qu’un petit Amour la regarde [e], ou bien celui qui a conçu cette Vénus accroupie qu’on voit dans le vestibule de la Villa Ludovici et qui tient un dauphin par la queue [f]. Généralement le vêtement de la déesse, noué au-dessus des hanches, laisse les jambes libres et sert, par derrière, de soutien (v. p. 97, A) ; ou bien la déesse est sur le point de ramener la draperie autour d’elle avec ses deux mains. Des exemples de ces deux motifs sont au Musée Chiaramonti du Vatican [g].

L’expression maternelle n’apparaît jamais dans les figures de Vénus que nous avons énumérées jusqu’ici. Il était rare que la déesse et son fils Cupidon fussent réunis en un groupe ; du moins nous n’avons rien de tel. Les enfants ailés qui l’entourent sont de petits Amours, mais non pas Éros lui-même. Le caractère maternel de la déesse inspira un type tout particulier ; peut-être remonte-t-il à une haute antiquité : en tout cas, il n’a été souvent reproduit qu’à partir des empereurs. Dans beaucoup de collections, surtout, par exemple, dans la salle de Junon, de la

  1. Il n’y a au Musée de Syracuse [h] une grande statue de Vénus ramassant dans le bas les plis bouffants de sa draperie.