Page:Burckhardt - Le Cicerone, 1re partie, trad. Gérard, 1885.djvu/127

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

facile c’était pour les héros de maîtriser des chevaux qui se cabrent, les palefreniers tiraillent l’animal et ont besoin d’un appui, mais non les Dioscures. Les chevaux sont aussi plus petits relativement : c’est qu’en général l’art antique établissait les proportions d’après l’importance relative des figures plutôt qu’en raison de leurs rapports de grandeur matérielle. Autrefois les Dioscures étaient placés parallèlement, et avec raison, sans nul doute ; leur groupement actuel avec le bassin de la fontaine et l’obélisque orne peut-être mieux la place.

Les deux Dioscures de l’escalier du Capitole [a], œuvre d’une assez bonne époque, mais singulièrement restreinte[1], semblent faits uniquement pour mettre en pleine lumière la valeur des statues du Quirinal.


Junon (Hera), la sœur et l’épouse de Jupiter, devait être personnifiée d’une manière grandiose qui répondît à sa qualité de reine des dieux et la fit reconnaître. La beauté mûre d’une femme majestueuse n’a jamais été mieux représentée que dans ce type, qui a aussi une expression d’étonnante jeunesse. Les statues de Junon sont le plus souvent modernes, mais on y discerne le souvenir d’un modèle magnifique : par exemple, la statue colossale de la Sala rotonda au Vatican [b]. Un plus petit exemplaire est à la Villa Borghese, salle de Junon [c] ; la Galleria delle Statue au Vatican en possède un autre [d]. La statue du Musée de Naples [e], dont la tête est moderne (corrid. 3, Capolavori), est en revanche une reproduction de la superbe Junon de Vienne, anciennement à Éphèse et seulement analogue à l’idéal consacré. La fine tunique, qui se moule sur le corps comme une draperie humide, sert, avec une intention parfois trop marquée, à faire ressortir les contours du buste ; mais d’ailleurs la douce majesté de la tête ornée d’un diadème, et l’attitude imposante avec laquelle le corps fait saillie à droite, laisse toujours nettement reconnaître la souveraine[2].

La Junon Lanuvina fut pour les sculpteurs romains un motif particulier. C’est une statue colossale qui se trouve également dans la Sala rotomla au Vatican [F]t Comme déesse protectrice des troupeaux, elle .1 la tête et le corps couverts d’une peau de bête ; l’épieu (restauré) àla main, elle s’avance comme pour défendre de vive force des bêtes attaquées » Sans doute, l’artiste a du reproduire dans le style gréco-romain la statue d’un temple antique de Lanuvium mais les traits sont bien ceux de Junon. L’œuvre a été plus d’une fois restaurée,

Bien mieux que n’importe quelle statue, deux célèbres têtes colossales

  1. Probablement exécutée en vue d’un emplacement tout à fait déterminé. — Il serait très désirable qu’un sculpteur donnât une explication raisonnée de la loi de perspective qui est la base de telles anomalies, (Camp. p. 72, G.)
  2. Plusieurs statues regardées comme des images de Junon pourraient bien être en réalité des statues de Venus reglna.