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paraît à l’empereur Julien, comme un chantier de fouilles archéologiques, comme un laboratoire de recherches sur l’histoire de l’art. Lepsius[1] commençait la publication de son grand ouvrage sur l’Égypte ; É. Gerhardt, Th. Panofka[2], le baron de Stackelberg[3], Fr. Welcker[4], Otto Jahn[5], continuant l’œuvre de Winckelmann, éditaient et expliquaient les monuments antiques, tombeaux, sculptures, bas-reliefs, vases peints, peintures murales. C’est là que Burckhardt s’est formé[6], qu’il a appris la technique du métier, qu’il a amassé sur la vie et l’art des anciens cette érudition prodigieuse dont témoigne la première partie du Cicerone, et aussi qu’il s’est épris pour l’idéal classique d’une préférence dont la trace apparaîtra plus tard dans nombre de ses jugements.

L’homme qu’il se plaît à appeler son maître et de qui, en effet, il semble avoir reçu l’impulsion, c’est Franz Kugler. Héritier de cette grande école du Nord dont Hamann et Herder furent les chefs, Kugler est lui-même un initiateur. Kugler, le premier, a étendu à l’histoire de l’art l’esprit, la méthode, introduits par Hamann dans la philosophie, par Herder dans l’histoire littéraire : je veux dire le sens des origines, du développement, l’intelligence du « devenir », la sympathie universelle et tolérante pour toute création et toute forme selon la diversité des races et des temps. L’idéal grec dès lors, l’art classique, tout en gardant peut-être sa primauté et sa maîtrise dans l’admiration des hommes, n’est plus l’objet unique ; — il vient à son rang, à sa date. Et c’est ainsi que, dans le Manuel de l’Histoire de l’art[7], sur vingt chapitres dont l’œuvre se compose, un seul est consacré à la Grèce, placée dans

  1. C. Lepsius, Denkmaler aus Égypten und Äthiopien. (Berlin, 1849-1868.)
  2. Th. Panofka, Tetracotten des Kœniglichen Museums zu Berlin, (Berlin, 1841-1842.)
  3. Otto Magnus, baron de Stackelberg, Die Griœber der Hellenen in Bilddwerken und Vasengemœlden. (Berlin, 1835-1837.)
  4. Fr. Welcker, Alte Denkmäler erklärt. (Gœttingen, 1819-1864.)
  5. Otto Jahn, Vasenbilder (Hamburg, 1839.)
  6. Burckhardt suivit à Bettin les coins de Bœck, de Droysen, de Sibel ; il se lia avec E Geibel,, qui vient de mourir (1884), et avec J. H. Kinkel, qui l’avait surnommé l’omniscient.
  7. Fr. Kugler, Handbuch der Kunstgeschichte. (Stuttgartt, 1841-1842.) La seconde édition, de 1848, comprend des additions de Burckhardt.