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CHAPITRE VIII
PEINTURE DE LA VIE ACTIVE.

La découverte de l’homme aurait été incomplète sans la peinture de la vie active.

Tout le côté comique et satirique des littératures du moyen âge n’avait pu se passer de l’image de la vie ordinaire. Mais c’est tout autre chose quand les Italiens retracent cette image pour elle-même, parce que c’est une fraction du grand tableau de la vie du monde qui les entoure de ses magiques couleurs. Au lieu et à côté de la comédie, cette espèce de satire dramatique qui se déroule dans les maisons, dans les rues, dans les villages, s’égayant aux dépens des bourgeois, des paysans et des prêtres, nous trouvons dans la littérature italienne les débuts de la vraie peinture de genre, bien avant que les peintres s’en occupent. Souvent, il est vrai, on voit encore les deux choses se confondre, mais cela ne les empêche pas d’être distinctes.

Que de faits de la vie commune Dante a-t-il dû observer et étudier avant de pouvoir décrire avec une vérité aussi saisissante les choses de l’autre monde[1] ! Les célèbres tableaux de l’activité déployée dans l’arsenal de Venise, des aveugles qui s’appuient les uns contre les

  1. Sur l’idée exacte qu’il a de l’espace, comp. p. 7, note 2.