Page:Burckhardt - La civilisation en Italie au temps de la Renaissance. Tome 2.djvu/253

Cette page n’a pas encore été corrigée

CHAPITRE II. — LA RELIGION DANS LA VIE JOURNALIERE. 249 rielle, il poussait l’iadifférence et la rigueur envers lui-même jusqu’à l’ascétisme. D’après lui, l’homme ne doit s’occuper que de ce qui intéresse directement le salut de l’àme.

Il le fait entendre nettement dans ses réflexions sur la littérature antique. « Le seul bien, dit-il dans un de ses sermons, que Platon et Aristote aient fait, c est d avoir produit beaucoup d’arguments dont on peut se servir contre les hérétiques. Eux et d’autres philosophes n’en sont pas moins en enfer. Une vieille femme en sait plus long que Platon en matière de foi. 11 serait bon pour la foi qu’on détruisit une foule de livres qui paraissent d’ailleurs utiles. Lorsqu’il n’y avait pas encore tant de livres, tant d’arguments {ragioni mturali) et tant de disputes, la foi grandissait plus vile qu’elle n’a grandi depuis. Il veut que dans les écoles oa ne lise qu’Horaère, Virgile et Cicéron, et que l’on complète ces lectures par celie de saiut Jérôme et de saint Augustin ; par contre, non-seulement Catulle et Ovide, mais encore Tibullc et Térence doivent être bannis. Une pareille sévérité ne prouve chez Savonarole qu’un zèle exagéré pour la pureté des mœurs ; mais dans un écrit spécial il va jusqu’à dire que la science en général est chose funeste. Il veut qu’an petit nombre de gens seulement la cultivent, afin que la tradition des connaissauces humaines ne périsse pas, afin qu’il y ait toujours quelques athlètes prêts à combattre les sophismes de l’hérésie ; tous les autres doivent se borner à l’étude de la grammaire, de la morale, et à l’instruction religieuse [tacrœ lUUrœ). » Ainsi le privilège de la culture reviendrait aux moines seuls, et, comme le gouvernement des Etats appartient de droit aux « hommes les plus savants et les plus pieux », ce sont encore les moines qui doivent être