accompagner par des amis ou par des connaissances.
Pétrarque n’emmena que son plus jeune frère et deux
paysans pris dans le dernier endroit oii il s’était reposé.
Au pied de la montagne, un vieux berger les conjure de
retourner sur leurs pas, leur disant qu’il y a cinquante
ans il a fait la même tentative, et qu’il n’en a rapporté
que des regrets, des membres brisés et des habits en
lambeaux i qu’avant cette époque et depuis, personne n’a
pins osé afirouter les dangers d’une telle entreprise.
Mais ils avancent au prix de fatigues incroyables jusqu’à
ce qu’ils voient les nuages flotter à leurs pieds, et
atteignent le sommet. On s’attend, mais eu vain, à une
description détaillée du panorama qui se déroule sons
les yeux des hardis voyageurs ; on ne trouve qu’une
nomeuclature sommaire des principaux points qu’ils
aperçoivent. Le poëte ne fait pas le tableau du paysage
qu’il a vu, non qu’il soit iusensible à la beauté de ce
spectacle, mais parce que l’impression qu’il en a ressentie
est par trop forte. Toute sa vie passée, avec toutes les
folies qu’il a commises, se retrace à son imagination ; il
se rappelle qu’il y a dix ans, jour pour jour, il a quitté
Bologne, et jette uu regard plein de regret vers la lointaine
Italie ; il ouvre un petit livre qui, eu ce temps-ià,
l‘accompagnait partout, les Confessions de saint Augustin,
et ses yeux tombent sur ce passage dn dixième chapitre :
« Et les hommes vont admirer les hautes montagnes,
les flots de la mer qui s’agitent au loin, les torrents qui
roulent avec fracas, l’immense Océan et le cours des
astres, et ils s’oublient eux-mêmes dans cette contemplation.
» Son frère, à qui ii lit ces lignes, ne peut comprendre
pourquoi il ferme ensuite le livre et garde le
silence.
Un certain nombre d’années plus tard, vers 1360,