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CHAPITRE III. — DÉCOUVERTE DE LA BEAUTÉ DE LA NATURE.


charme des descriptions qu’il fait ou plutôt qu’il invente. Enfin Pétrarque, un des premiers hommes complètement modernes, atteste par son exemple combien était puissant l’attrait d’un beau paysage pour une âme sensible. L’esprit lumineux qui, le premier, a recherché dans toutes les littératures l’origine et les progrès de l’amour du beau dans la nature, et qui, en écrivant les Tableaux de la nature, a fait lui-même un chef-d’œuvre de description, Alexandre de Humboldt, n’a pas tout à fait rendu justice à Pétrarque ; aussi trouvons-nous encore quelques épis à glaner après le grand moissonneur.

Pétrarque n‘était pas seulement un géographe et un cartographe distingué — on dit que c’est lui qui a fait la première carte d’Italie [1] ; — il ne se contenta pas non plus de répéter ce qu’avaient dit les anciens [2] ; au contraire, il a vu la nature par lui-même. Il aime à jouir du spectacle de la nature tout en se livrant à ses travaux intellectuels ; c’est ce qui explique la vie d’anachorète et de savant qu’il a menée dans la Vaucluse et ailleurs, ainsi quesesexilset ses retraites volontaires [3]. Ce serait lui faire injure que de l’accuser d’insensibilité parce qu’il ne sait pas bien peindre la nature. Sa description du merveilleux

  1. Flavio Biondo, Italia illustrait (ed. Basil.), p. 352 ss. Comp. aussi Epm. mr., LXI, ed. Fragass. (lat.), III, p. 476. Sur le projet qu’avait Petr. d’écrire un grand ouvrage géographique, voir les renseignements donnés par Attilio HortiS, Accenni alle scienze naturali nelle opere di G. Boccacci. Trieste, 1877, p. 45 ss.
  2. Bien qu’il s’en rapporte volontiers à eux, p. ex. De »Ua solitana, surtout {Opera, ed. Basil., 1581) p. 241, où il cite la description d’un berceau de vigne tirée de S. Augustin.
  3. Epist. famil., VIÏ, 4, ed. FraCassette, vol. I, p, 367. Interea utînam scire posses, quanta cum volupiate solivagm m liber, inter montes et nemora, inter fontes et Jlamina, inter libros et maximorum hominum ingenia respiro, quam^e me in ea, quœ ante sunt, cwm Apostolo extendens et prœtenta oblivisci nitor et prœsentia non vtdere. Comp. VI, ni, 316 ss surt 334 Comp. aussi le rapprochement fait par Geiger, Pétrarque, p. 75, note 5, 266.