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CHAPITRE II. — U RELIGION DANS LA VIE JOURNALIÈRE. 225 velle ne ménage pas non plus le clergé séculier*. En troisième lieu, tout le reste de la littérature offre des témoignages sans nombre qui montrent avec quelle hardiesse le public parlait de la curie romaine et la jugeait ; mais dans les libres créations de la fantaisie il ne faut s’attendre à rien de pareil. Enfin les moines eux-mèmes savaient parfois se venger d’une manière terrible.

Ce qui est positif, c’est que les moines surtout étaient détestés, et qu’on les considérait comme la preuve vivante des tristes effets de la vie religieuse, du néaut de l’Église, des croyances répandues, de la religion en général, suivant qu’on se plaisait à étendre scs déductions. On peut bien admettre, pour expliquer ce fait, que iTtalie avait un souvenir plus net que d’autres pays de la naissance des deux grands ordres mendiants, qu’elle se rappelait encore qu’ils avaient été à l’origine les fauteurs de la réaction contre* ce qu’on appelle l’hérésie du treizième siècle, c’est-à-dire contre une des premières manifestations de l’esprit italien moderne. Quant à la police ecclésiastique, qui est restée confiée surtout aux Dominicains, elle n’a certainement jamais inspiré d’autres sentiments que la haine et le mépris. Quand on lit le Décaméron et les Nomelks de Franco

  • bandello, il nov. 1, entre ainsi en matière : Chei personne le

vice de la cupidité n’est plus odieux que chez les prêtres. (Voir De avaritia dans le traité du Pogge, où il est surtout question de ? prêtres, particulièrement des moines mendiants, qui n om pas de famille à soutenir, etc.) C’est par ce raisonnement qu’il justifie l’attaque scandaleuse d’un presbytère par uu jeune seigneur qui envoie deux soldats ou deux bandits voler un mouton  un t uré avare, il est vrai, mais paralytique. Une seule histoire de ce genre fait mieux coanaitre que tous les traités les idées qui régnaient en ce temps-Ià.

  • GioT. Villani, IV, 2«, le dit très-nettement un siècle plus

tard.

H. U