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aoo MOBURS ET RELIGION.

du Nord. Plus tard s’établissent entre les enfants et les parents des rapports de tendresse et de respect tempérés par une certaine liberté.

En général, il est très-difficile de se prononcer sur la question des sentiments chez d’autres nations. La sensibiliîé peut être très-développée chez un peuple, mais elie peut avoir des caractères si particuliers que l’étranger ne saura ni la reconnaître ni même la deviner. Peutêtre toutes les nations occidentales sont-elles également bien partagées sous ce rapport.

Mais c’est surtout dans les relations illicites entre les deux sexes que l’influence de l’imagination sur la moralité a été souveraine. On sait qu’en général le moyen âge aimait assez les amours faciles jusqu’au moment où la syphilis fit son apparition ; nous n’avons pas d’ailleurs à faire ici la statistique comparée de la prostitution de tout genre telle qu’elle existait à cette époque. Mais ce qui paraît être particulier à l’Italie de la Renaissance, c’est que le mariage et ses droits y sont foulés aux pieds plus impudemment qu’ailleurs. 11 n’est pas question des jeunes filles des classes élevées, qu’on isole soigneusement du monde ; ce sont les femmes mariées seules qui recherchent les plaisirs de l’amour défendu. Ce qui est digne de remarque, c’est que le nombre des mariages ne diminua pas pour cela, et que la famille ne fut pas, à beaucoup près, atteinte comme elle l’aurait été dans le Nord sous l’empire de circonstances semblables. On voulait vivre entièrement selon son bon plaisir, sans renoncer le moins du monde à la famille, même quand il était à craindre qu’elle ne fût souillée par des éléments étrangers. Aussi la race ne dégénéra-t-elle ni physiquement ni intellectuellement, car l’amoindrissement intellectuel apparent que l’on constate vers le milieu du seizième