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prétend pas qu’il connaisse tout à fond, sauf pourtant le maniement des armes ; c’est précisément cette universalité superficielle qui constitue l‘individu accompli, c’est-à-dire celui qui possède toutes les qualités sans qu’il en résulte une supériorité gênante pour les autres.

Ce qui est certain, c’est qu’au seizième siècle les Italiens. joignant l’exemple au précepte, furent les maîtres de tout l’Occident pour tout ce qui peut former l’homme de société par excellence. En ce qui concerne l’équitation, l’escrime et la danse, ils ont donné le ton par des ouvrages ornés de gravures et par l’enseignement pratique ; la gymnastique sérieuse et raisonnée a peut-être été enseignée pour la première fois par Vittorino da Feltre (t. I, p. 262), et elle est restée depuis un des éléments obligés de l‘éducation parfaite [1]. Ce qui est remarquable, c’est qu’elle est enseignée d’une manière méthodique ; malheureusement il nous est impossible de dire sur quels exercices on insistait particulièrement, et si ceux qui sont en vogue aujourd’hui étaient connus à cette époque-là. Mais ce que nous savons, c’est que les Italiens, fidèles à leur manière de voir habituelle,

  1. Cœlius Calcagninus (Opera, p. 514) donne les détails suivants sur l’éducation d’un jeune Italien de qualité qui vivait vers 1500 (dans l’oraison funèbre d’Antonio Costabili) : d’abord artes liberales et ingenuœ disciplinœ, tum adolescentia in iis exercitationibus acta, quœ ad rem militarem corpus animumque prœmuniunt. Nunc gymnastœ (c’est-à-dire le maître de gymnastique) operam dare, luctari, excurrere, natare, equitare, venari, aucupari, ad palum et apud lanistam ictus inferre aut declinare, cœsim punctumve hostem ferire, hastam vibrare, sub armis hyemem juxta et æstatem traducere, lanceis occursare, veri ac communis Martis simulacra imitari. Cardanus (De propria vita, ch. vii) cite aussi parmi ses exercices de gymnastique l’action de sauter sur le cheval de bois. - Comp. Rabelais, Gargantua, I, 23. 24 : l’éducation en général, et 35 : les tours des gymnastes. — Même pour les philosophes, Marsile Ficin (Epist. IV, 171, Galeotto) demande l’habitude de la gymnastique ; Matteo Vegio, De puerormm educatione, lib III, c. V.