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tion sur le fanatisme des puristes, sur leurs congrès linguistiques, etc, [1] ; leur influence ne devint sérieusement nuisible que plus tard, lorsque le souffle d’originalité qui avait animé la littérature se fut affaibli et qu’ii s’évanouit même sous l’action de causes bien plus puissantes. Enfin, l’Académie della Crusca était libre de traiter l’italien comme une langue morte. Mais elle était réduite à une telle impuissance qu’elle ne put pas même l’empêcher de prendre au siècle dernier l’esprit français.

C’était cette langue aimée, cultivée, assouplie par tous les moyens, qui constituait, sous la forme de la conversation, la base de la sociabilité. Tandis que, dans le Nord, la noblesse et les princes vivaient isolés ou bien dépensaient leurs loisirs dans les tournois, à la chasse, dans des cérémonies pompeuses, que les bourgeois passaient leur temps à se livrer à des jeux ou à des exercices corporels, parfois aussi à versifier ou à célébrer des fêtes, il y avait de plus, en Italie, une sphère neutre où des gens de toute origine, dès qu’ils avaient le talent et la culture nécessaires, s’amusaient à causer et à échanger des idées sérieuses ou gaies sous une forme noble et délicate. Comme la question de l’hospitalité ne venait qu’en seconde ligne [2], il était facile de tenir â l’écart les sots et les parasites. Si nous pouvions prendre au mot les

  1. Vers la fin de l'année 1531, un congrès de ce genre devait avoir lieu â Bologne, sous la présidence de Bembo, après qu’une première tentative avait échoué. Voir la lettre à claud. Tolomei, dans FiheNzüola, Opere, vol. U, Appendices, p. 231 ss. Pourtant ii s’agit ici moins du purisme que de la vieille querelle entre les Toscans et les Lombards.
  2. Vers 1550, Luigi Cornaro se plaint (au commencement de son Trattaio della vita sobria) du fait suivant : ce n’est que depuis peu de temps qu’on voit l‘Italie envahie par les cérémonies et les compliments (espagnols), par le luthéranisme et par la débauche (La tempérance et la liberté, la facilité des relations sociales disparurent en même temps.) Comp. p. 93 et 94.