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dans l’effort. Dante nous transporte au beau milieu de cette lutte ; son écrit « sur la langue italienne [1] » n‘est pas seulement important an point de vue de la langue elle-même, c’est aussi le premier ouvrage raisonné sur une langue moderne en général. La marche qu’il suit et les résultats auxquels il arrive intéressent particulièrement l’histoire de la linguistique, qui leur assure à jamais une place considérable. Nous n’avons à constater ici qu’un fait ; c’est que, bien longtemps avant la composition de cet ouvrage, la question de la langue a dû être pour les Italiens la grande préoccupation de tous les jours, qu’on avait étudié tous les dialectes avec enthousiasme ou avec répugnance, mais toujours avec partialité, eufin que l’enfantement d’une langue idéale à l’usage de tous a été aussi lent que laborieux [2].

C’est Dante qui, par son grand poëme, a le plus contribué à fonder cette langue si ardemment rêvée. Le dialecte toscan fut la base principale de cette langue de l’avenir [3]. Si l’on trouve que nous exagérons, nous

  1. De vulgari eloquio, ed. Corbinelli, Parisîîs, 1677, D’après Boc-CACE, Vita di Dante, p. 77, ouvrage qu’il a composé peu de temps avant sa mort ; comp. d’autre part les remarques de Wegele, Dante, p. 261 SS, — Il parle au commencement du Convîto de la rapide et remarquable transformation que la langue a subie de son vivant.
  2. II faut rappeler â ce propos des recherches comme celles que font, par ei., Léonard Arétin [Epht., ed. Meuus, II, p. 62 ss., lib. VI, 10) et Îe Pogge [Historiœ diteeptaîivœ convimUs très dans 0pp., fol. 14 ss.) : si primitivement la langue populaire a été la même que la langue savante. Léonard répond négativement ; le Pogge résout la question par l’affirmative, en rétorquant les arguments de son devancier. — comp. aussi l’exposé détaillé de L. B. Alberti dans l’introduction de son ouvrage, Délia famîglia, livre III : De la nécessité de la langue italienne pour les relations sociales.
  3. Un connaisseur italien pourrait facilement dresser le tableau des progrès successifs de cette langue dans la littérature et dans la vie journalière. Il faudrait constater combien de temps, pendant le quatorzième et le quinzième siècle, les différents dialectes se sont maintenus intacts ou ont été mélangés dans la correspon-