avenir sérieux et durable, c’est qu’en matière pécuniaire il respectait scrupuleusement les engagements qu’il avait pris, ce qui lui faisait trouver du crédit chez les banquiers, même après la défaite ; c’est que partout il protégeait les paysans contre la licence des soldats, et qu’il ne permettait pas de détruire les villes conquises ; mais ce qui le montre mieux que tout le reste, c’est qu’il maria sa célèbre concubine (Lucie, mère de François) à un autre, afin de rester libre de s’allier à une famille princière. Le mariage de ses proches était subordonné à des calculs dn même genre. Il ne donna jamais dans l’impiété ni dans la vie désordonnée des autres condottieri ; les trois maximes qu’il recommanda à son fils François lorsqu’il le lança dans le monde, étaient celles-ci : Ne touche jamais à la femme d’autrui ; ne frappe aucun de tes gens, ou, si cela t’arrive, envoie-le bien loin ; enfin, ne monte jamais un cheval ayant la bouche dure ou sujet à perdre ses fers. Mais avant tout il avait pour lui la personnalité, sinon d’un grand capitaine, du moins d’un grand soldat, un corps robuste, rompu à tous les exercices, une figure de paysan bien populaire, une mémoire remarquable grâce à laquelle il connaissait et retenait ce qui avait rapport à tous ses soldats, à tous leurs chevaux, à tous les détails de leur vie de mercenaires. Le cercle de ses connaissances ne s’étendait pas au delà de l’Italie ; mais il consacrait tous ses loisirs à l’étude de l’histoire et faisait traduire pour son usage des auteurs grecs et latins.
François, son fils, qui surpassa encore la gloire de son père, a travaillé dès l’origine à fonder une grande domination ; aussi a-t-il gagné le puissant duché de Milan, grâce à l’éclat avec lequel il a conduit ses armées et à sa mauvaise foi, qui ne connaissait point de scrupules (1447-1450).