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LA RÉSURRECTION DE L’ANTIQUITÉ.

d’Aristote, surtout celles qui sont contenues dans sa Morale[1] et dans sa Politique, sont devenues de bonne heure le bien commun des lettrés de toute l’Italie, et que le philosophe grec faisait loi en matière de métaphysique[2] ; insiguifianle, aucontraire, si l’on considère le peu d’action qu’ont eue, au point de vue dogmatique, les philosophes anciens et même les philosophes florentins, ces fervents adeptes de Platon, sur l’esprit de la nation italienne. Tout ce qui ressemble à une action de ce genre n’est, en général, qu’un phénomène normal de la culture intellectuelle, qu’une conséquence naturelle du mouvement des esprits en Italie. À propos de la religion, nous aurons encore quelques remarques à faire. Pourtant, dans la plupart des cas, ce n’est pas la culture générale qui est en jeu, mais seulement ce qui se produit chez certains individus ou dans certains cercles savants, et même là il faudrait chaque fois faire la distinction entre le culte sérieux de l’antiquité et un engouement passager qui n’est qu’une affaire de mode. Car pour beaucoup d’esprits l’amour de l’antiquité n’était que cela, même quand l’étude des anciens les faisait arriver à une véritable érudition.

Cependant tout ce qui nous parait affecté aujourd’hui ne l’était pas forcément en ce temps-là. L’usage de prendre pour noms de baptême des noms grecs et romains, par exemple, est plus beau et plus respectable que la mode actuelle qui consiste à prendre (surtout pour des noms de femme) des noms tirés des romans. Du moment qu’on met le monde antique au-des-

  1. Un cardinal du temps de Paul II fit exposer même à ses cuisiniers la marale d’Arist. Comp. Gasp, Veron., Vita Pauli II, dans Muratori, III, IL col. 1034,
  2. Pour i’éiudc d’Aristote en général, on consultera avec beaucoup de fruit un discours d’Harmolaus Barbarus.