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LA RÉSURRECTION DE L’ANTIQUITÉ.

comme il l’avait fait jusqu’alors, Piero étudia jour et nuit ; il fut l’ami de tous les gens instruits et devint un homme d’État éminent. Il apprit par cœur toute l’Énéide et un grand nombre de discours de Tite-Live, profilant pour cela du trajet qu’il avait à faire entre Florence et sa maison de campagne de Trebbio[1].

Giannozzo Manetti[2] (1393-1459) représente l’antiquité à un autre point de vue et dans un sens plus élevé. Il était d’une précocité remarquable : à peine sorti de l’enfance, il avait déjà fait l’apprentissage du commerce et était teneur de livres chez un banquier ; mais après quinze ans d’un travail ingrat, considérant combien cette occupation était vaine et stérile, il éprouva un désir violent de se vouer à la science, par laquelle seule l’homme peut s’assurer rimmortalité. Il fut un des pre-

  1. Pour compléter ces détails sur Nicoli, faisons remarquer que, comme Vittorini, Iui non plus n’a rien écrit, parce qu’il était convaincu que ses oeuvres n’auraient jamais la perfection qu’il rêvait, que ses sens étaient tellement délicats qu’il neque rudentem asinum, neque secantem serram, neque muscipulam vagientem sentire audireve poterai. Mais il ne faut pas Oublier ses côtés faibles. Il enleva à son frère une jeune fille qu’aimait ce dernier, Benvenuta ; il s’attira par là la colère de Léonard Arélin ; Benvenuta le brouilla avec bon nombre de ses amis. Il s’irritait quand on refusait de lui confier des livres ; un jour il eut avec Guarino une querelle violente pour un motif de ce genre. Il n’était pas exempt d’une envie mesquine ; c’est cette passion qui fit qu’il s’attaqua à Chrysoloras, au Pogge et à Filelfo, et qu’il chercha à les éloigner de Florence.
  2. Sur sa Viia par Naldius Naldi, dans Mürat., XX, coi. 632 ss. D’autre part, Vespasiano Bisticcî, Commentario délia viia di Meuer Giannozzo Mannetti, publié pour la première fois par P. Fanfani deais Collezione di opere inedile o rare, vol. 11, Torioo, 1862. Il faut distinguer le commentaire de la courte biographie de Mannetti, écrite par le même auteur, dans laquelle on renvoie fréquemment au commentaire. Vesp. était très-lié avec G M. ; il voulait dans la biographie en question faire le portrait idéal d’un homme d’État pour Florence corrompue. — Vesp. est la source à consulter pour Naldi. Comp aussi le fragment qui se trouve dans Galetti, Phil. Vill. hber. Flor., 1847, p. 129-138. Un demi-siècle après sa mort, G. M. était à peu près oublié. Comp. Paolo Córtese, p. 21