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CHAPITRE IV
L’HUMANlSME AU QUATORZIÈME SIÈCLE.

Qui a fondu l’esprit antique et l’esprit moderne, et fait de l’antiquité la base de la culture actuelle ?

C’est une légion à cent têtes qui ne se montre jamais sous le même aspect ; mais ce que savaient les hommes qui la composaient, ce que savaient leurs contemporains, c’est qu’ils étaient un nouvel élément de la société civile. On peut considérer comme leurs principaux précurseurs ces clercs errants du douzième siècle, de la poésie desquels il a été question plus haut (p. 215 ss.) ; c’est la même existence vagabonde, c’est la même liberté ou plutôt la même licence dans les idées sur la vie et le monde ; mais c’est du moins le premier essai de rénovation de la poésie par l’antiquité. En face de la culture du moyen âge qui, au fond, est surtout religieuse, naît une culture nouvelle qui se rattache particulièrement à ce qui a précédé le moyen âge. Ceux qui travaillent à la propager deviennent des personnages importants[1], parce qu’ils savent ce qu’avaient su les ancieus, parce qu’ils commencent à penser et bientôt à sentir comme pen-

  1. Le Pogge, par exemple, nous dit comment ils se taxaient eux-mêmes (De avaritia, opp. ed. 1513, fol. 2, les deux premières phrases de l’introduction) ; d’après lui, ceux-là seuls peuvent dire qu’ils ont vécu, se vixisse, qui ont écrit des livres latins pleins de savoir et d’éloquence ou qui ont traduit du grec en latin.