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DÉVELOPPEMENT DE L’INDIVIDU.

victimes que celles auxquelles Aristophane osait s’attaquer, par exemple, quand il mettait en scène les grands tragiques grecs. Mais la même maturité intellectuelle qui, chez les Grecs, fit naître la parodie à une époque déterminée, la fit fleurir également en Italie. Dès la fin du quatorzième siècle, les plaintes amoureuses de Pétrarque sont parodiées sous ia forme de sonnets burlesques ; même l’allure solennelle du poëme en strophes de quatorze vers est tournée en dérision et traitée d extravagante. C’est surtout à propos de la Divine Comédie que le goût de la parodie se donna carrière ; Laurent le Magnifique a su déployer la verve comique la plus brillante dans le style de l‘Enfer (Symposio ou I Beoni). Luigi Pulci, dans son Margante, imite visiblement les improvisateurs ; de plus, sa poésie et celle de Bojardo sont déjà la vague parodie de la poésie chevaleresque du moyen âge. Puis vient le grand parodiste Théophile Folengo (qui florissait vers 1520), qui s’attaque directement aux Roland et aux Amadis. Sous le pseudonyme de Limerno Pitocco, il compose son Orlando, où la chevalerie n’est plus qu’un cadre ridicule et suranné dans lequel il place une foule d’idées et de figures modernes i sous le nom de Merlin Coccaie, il décrit les faits et gestes de ses vagabonds fantastiques, qu’il agrémente également d’anachronismes plaisants ; il raconte leurs aventures en hexamètres à moitié latins et s’approprie plaisamment la forme solennelle de l’épopée sérieuse d’alors (Opus Macaronicorum). Depuis, la parodie n’a jamais cessé d’étre représentée au Parnasse ita-

    généralement à un dessin fait en quelques coups de crayon ; peut-être aussi beaucoup d’œuvres de ce genre ont-elles disparu. La caricature est tout autre chose ; Léonard dans ses grimaces (dans la bibliothèque Ambrosienne) représente le laid quand et parce qu’il est comique, et renforce ce comique à volonté.