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CHAPITRE IV. — LA RAILLERIE ET L’ESPRIT MODERNES.

Vers le milieu du quinzième siècle, les deux farceurs es plus célèbres étaient un curé du voisinage de Florence, Arlotto (1483), pour l’esprit délicat (facezie). et le fou de la cour de Ferrare, Gonnella, pour les bouffonneries. Il serait téméraire de comparer les histoires qu’ils racontent avec celles du curé de Kalenberg et de Till l’Espiègle ; ces dernières ont une tout autre origine : elles sont à moitié mythiques, de telle sorte que tout un peuple y a travaillé et qu’elles s’adressent à tout le monde, tandis qu’Arlotto et Gonnella étaient des personnalités définies et connues. Mais si l’on veut entrer dans la voie des rapprochements et étendre la comparaison aux facéties » des peuples étrangers à l’Italie, on trouvera en somme que, dans les fabliaux français[1] comme chez les Allemands, la facétie a pour premier objet un avantage matériel à obtenir ou une jouissance positive à éprouver, tandis que les mots plaisants d’Arlotto et les farces de Gonnella sont en quelque sorte désintéressés et que leurs auteurs n’ont en vue qu’une satisfaction d amour-propre. (D’autre part, Till l’Espiègle apparaît comme un type à part, savoir comme une personnification, assez fade d’ailleurs, de la raillerie dirigée contre certaines classes et certaines professions.) Le bouffon de la cour d‘Este s’est plus d’une fois vengé de ceux qui rhumiliaient par des sarcasmes amers et des tours raffinés[2].

    À en juger par leur confenu, les Facéties du Pogge sonf de la même famille que les Nouvelles de Sacchetti : on y trouve des farces, des insolences, des quiproquos d’hommes simples et naïfs opposés à des obscénités raffinées ; mais elles contiennent en plus grand nombre de ces jeux de mots qui trahissent le philologue. — sur L. B. Aberti, compar. p. 173 ss.

  1. icettl wurcT“ «ulienuM qui ont été puisées à cette source.
  2. D’après Basdiuo. IV, A'™, i, Gonnella savait aussi se grimer