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DÉVELOPPEMENT DE L’INDIVIDU.

lui rendre ces honneurs extraordinaires jusqu’au moment où il tomba en disgrâce sous le règne d’un tyran issu de la maison de Carrare (1318).

Pétrarque aussi respire à pleins poumons l’encens réservé autrefois aux héros et aux saints, et il se persuade même dans ses dernières années qu’il est incommodé par ce parfum qui le suit partout. Sa lettre « à la postérité[1] » est en quelque sorte le compte rendu de sa vie, que l‘illustre vieillard doit à la curiosité publique ; il voudrait bien que son nom fût glorieux dans l’avenir, mais il aimerait mieux n’avoir pas les ennuis de la gloire dans le présent [2] ; dans ses dialogues sur le bonheur et le malheur [3], les arguments les plus forts sont produits par l’interlocuteur qui montre le néant de la gloire. Mais faut-il en vouloir à Pétrarque s’il est heureux de voir que le Paléologue qui règne sur Byzance [4] le connaît par ses écrits aussi bien que le

    que je m’abstiens de décider. La personnalité un peu solennelle de Mussatus peut se reconnaître rien qu’à son histoire de Henri VII.

  1. Franc. Petrarea posteriiaii OM ad posttro», dans les édit. de SCS œuvres, au commencement, ou comme lettre unique du liv. XVIII des cpp.’enfin dans Fracassettî, Petr. epistolœ familiares, I, (1859), p. 1-11. Certains modernes qui blâment la vanité de P. ne seraient peut-être pas restés, à sa place, aussi bons et aussi fermes que lui.
  2. Opéra, éd. 1851, p. 117 : De ceîehrilate nominis importuna. Il lui répugnait notamment d’être célèbre parmi la multitude : Eppfam. , vol. I, p. 337, 340 et aut. De même que chez Pétrarque, on trouve chez maint humaniste de vieille roche la lutte entre la passion de la gloire et le désir de se conformer à l’humilité chrétienne en restant modeste et inconnu.
  3. De remediis ufriusque forturm, dans les différentes éditions ; souvent imprimé à part, p. ex., Berne 1600. U faut surtout citer ici le fameux dialogue de Pétrarque, Secreixm ou De contemptu mundi, ou De confiiatu curamm suarum, dans lequel Augustin, un des interlocuteurs, déclare que l’ambition surtout est un défaut condamnable.
  4. Epp./am., lib. XVllI (ed. Fracass.), 2. Blondus, p. (Italia {llustrata, p, 146), BOUS indique ce qu’était la gloire de Pétrarque