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DÉVELOPPEMENT DE L’INDIVIDU.

Enfin l’exil use l‘homme ou bien il élève ses facultés à leur plus haute puissance. « Dans nos villes si populeuses, dit Joviens Pontanus[1], nous voyons une foule de gens qui ont quitté volontairement leur patrie ; ou emporte partout avec soi ses qualités et ses vertus. » En effet, ce n’étaient pas seulement des condamnés qui s’étaient expatriés ; des milliers d’individus avaient abandonné volontairement le sol natal, parce que la situation politique ou économique était devenue intolérable. Les Florentins qui avaient émigré à Ferrare, les Lucquois qui étaient allés s’établir à Venise, etc., formaient des colonies entières.

Le cosmopolitisme qui se développe chez les exilés les plus heureusement doués est un des degrés les plus élevés de rindividualisme. Comme nous l’avons dit plus haut (p. 96), Dante trouve une nouvelle patrie dans la langue et dans la culture intellectuelie de l’Italie ; il va même plus loin quand il dit : « Ma patrie est le monde en général[2] ! » — Et quand on voulut lui permettre, à des conditions humiliantes, de revenir à Florence, il répondit : « Ne puis-je pas contempler partout la lumière du soleil et des astres ? Ne puis-je pas méditer partout sur les plus grandes vérités, sans pour cela paraître devant le peuple et devant la ville comme un homme obscur et même couvert d’ignominie ? Je ne


    RENT., p. ^1 »&, 37» ; mais à U snite de nefivelles recherches de Fr. Palermo (Florwwe, 1171), il a été proivé que c>st Alberti qui en est l‘auteur. Cet oavrage a toujours été cité d’après l’édition ToRfNO, Pmttha, 1828.

  1. Trmeüt, p. 65 ss,
  2. aOT. DontanCS, Dt fortîtuiRnt, î. U, fii. TV, Dt toÎtrairâo exHio. Soixante-dix ans plus tard, Cardan pouvait se demander {De viia propria, cap. XXXh) avec amertume : Qmd est patria, nm consens«* tyrannerrum «tìmHonm «d opprimendo» imbHlet timi^ et qui pkrvmque nmtimwàif