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CONCLUSION
L’ITALIE DES PATRIOTES

Nous allons examiner brièvement le contre-coup de cette situation politique sur l’esprit de la nation en général.

L’état d’incertitude politique dans lequel l’Italie s’est trouvée au quatorzième et au quinzième siècle a provoqué naturellement l’élan du patriotisme et l’idée de la résistance dans les cœurs généreux. Déjà Dante et Pétrarque[1] proclament hautement la nécessité de l’unité italienne et disent que tous les efforts doivent tendre à ce but. On objecte bien qu’il ne faut voir dans ce fait que la manifestation des aspirations généreuses de quelques esprits d’élite, et que la masse de la nation était étrangère à ces idées ; mais qu’on se rappelle que l’Allemagne rêvait, elle aussi, l’unité réelle, bien qu’elle eût déjà l’unité nominale et un souverain reconnu, l’Empereur. La première voix qui s’élève pour glorifier l’Allemagne une et forte (à part quelques vers des Minnesaenger), c’est celle des humanistes du temps de Maximilien Ier[2]; elle apparait souvent comme un écho

  1. Petrarca, Epist. fam., I, 1, ed. Fracassetti (1859), vol. I, p. 40, où il remercie Dieu d’être né Italien. Ensuite : Apologia contra cuiusdam anonymi Galli calomnias, de l’année 1367. Op. ed Bas., 1581, p 1068 ss. (Pour l’ensemble : L. Geiger, Pétrarque, p. 129-145.)
  2. Je veux parler surtout des écrits de Wimpheling, Bebel, etc.,